estela torres

Il était une fois Estela - Laurence Hecht - 2004


Il était une fois Estela …
J’ai écris, il y a déjà quelques temps le début de l’histoire. Estela me demande à nouveau un petit texte pour sa prochaine expo.

- OK, montres moi tes images !

Je sais pas quoi dire.

La date butoir pour l’édition approche et je n’ai toujours pas écrit un mot. Je n’y arrive pas, ou plutôt tout se complique.

- Estela, je crois que je ne vais pas y arriver, je peux pas écrire… Tu vois, je comprends là que si j’écris sur tes images, sur ce que je vois, alors irrémédiablement, je parle de moi…

- C’est pas grave, fais le au moins pour toi.

- … je sais pas…

Le début de l’histoire était beaucoup plus simple ; le travail d’Estela était celui d’une mère, ou plutôt d’une enfant devenue mère.

Pas moi.

Cette série là me confond : il y a d’abord cette Odalisque nonchalante sur le sofa et puis derrière, toute petite, cette fillette qui fait des galipettes et des pirouettes devant la glace.

Drôle d’échange avec Estela ;
Comme cet été sur la plage, en proie au regard des autres,
Toutes deux moribondes dans nos maillots de bain…

Ok.
Estela me demande un contenu pour ces images et m’offre dans le même temps un _ contenant à mes propos.
Mais comment pourrait-il en être autrement ?
Elle, Moi, toujours si dépendantes du regard de l’Autre.

- Je vois donc je suis.

Au premier coup d’œil me voilà surprise et étonnée par cette dernière série.
Estela qui s’expose, Estela qui se montre…
Ici, ce ne sont plus ses enfants et son rôle de mère, sa vie de famille avec tous ses petits drames et tracas, mais Estela seule, superbe,
Exhibant sa féminité sous l’œil d’un cyclope. (Estela travaille d’après des photos prises par son mari)
Série d’autoportraits d’une femme.
Fantasmes et érotisme …

- Miroir, oh mon beau miroir, dis-moi que je suis la plus belle Et puis, dans un second temps, je me souviens de cette phrase de Francis Bacon : « le visage humain n’a pas encore trouvé sa face ».
Et si il s’agissait plutôt d’une quête effrénée d’images,
d’images à soi, images de soi entendues comme une image capable de soutenir toute la violence de mon regard,
à mon égard.

Image à soi
Image de soi
Image pour soi
Estela n’a pas encore trouvée sa face.

- Miroir oh mon beau miroir, dis moi simplement que j’existe !

De loin, et d’une voix analytique
L’Oracle nous indique :
Le stade du miroir pour les uns, le sein de la mère pour les autres …
Comme si toute l’histoire des échanges, des flux et des reflux, s’éprouvait d’abord là,
Dans ces face à face.
Alors Estela est une petite fille jouant, mimant, singeant
Cherchant désespérément sa toute première îcone.-

Que se passe t-il si l’enfant ne trouve pas son image ou pire encore,
si la seule image qui lui revienne se déforme, se fissure ou se morcelle mille fois ?

- Au début, rien.
L’enfant joue, mime, singe
Encore et encore,
Encore et encore …

………………….
Jusqu’au spasme !

Alors soudain,
L’enfant prend peur et s’efface.
Il ne veut plus jouer
Il ne cherche plus le regard des autres.
Il réduit de lui-même son terrain de jeu,
Cadres après cadres
Et finit par se confondre pleinement dans cette petite forme inachevée,
Sur un fond vert.

Laurence Hecht / fév.04


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